Le cinéma français de 1935 à 1945 (2) : le cinéma français sous l'Occupation (1940-1944) / Les Enfants du Paradis (1945)

Publié le par La fée Paradis

Rappel

 

Le cinéma français de 1935 à 1945 (1) : le réalisme poétique (1935-1939) / La Grande Illusion

 

 

Ce que j'ai retenu du cours

 

Encore une fois, ce cours était présenté par Emmanuel Leclercq, la projection d'extrait assurée par les projectionistes du Méliès, et la restauration de l'intercours proposée par le Caméléon. Comme le temps le permettait (un trentaine de gdegrés quand même), on a mangé des samossas en terrasse sur la mezzanine (c'était dans le cadre de ma  Terrassothérapie ).

 

Cette période fait l'objet de cofusion et de flou, peu d'acteurs se sont exprimés à son propos et encore moins avec franchise. Il y a donc peu de sources pour létudier. 220 films ont été produits et réalisés en France de 1940 à 1945, c'est très peu.

 

Système de production pendant l'Occupation

 

La Continentale Films a été créée en 1940. Il s'agit d'une société de production française  financée par des capitaux allemands et dirgée par un allemand, Alfred Greven, qui était hystéro mais pas vraiment nazi et surtout adorait le cinéma français et l'art français en général. La Continentale a proposé un marché aux meilleurs réalisateurs, techniciens, acteurs ... : soit ils bossent pour elle, soit il n'y aura plus de cinéma français pendant 1000 ans (la durée escomptée du règne du grand reich sur le monde, modestement). Cependant, aucun film de propagande bête et méchante n'a été réalisé durant l'Occupation puisque la Continentale n'exerçait pas de pression dans ce sens (lié à la personnalité de Greven). Les films réalisés étaient presque tous défaitistes (même s'il n'y avait pas de défaitisme concerté) et ne traitaient pas de la vie quotidienne sous l'occupation. Ce n'était pas non plus des films de resistance.Il s'agissait plutôt d'endormir sutilement les consciences françaises.

 

La propagande de base est rare (voire  Du cinéma fasciste italien au néo-réalisme / Ossessione (1942)  ). La vraie propagande est plus pernicieuse et plus difficile à énoncer. Elle considère certaines vérités comme acquises, ce n'est donc pas la pein d'en parler (la terre qui ne ment pas, le travail, la famille et la patrie comme valeurs qu'il n'est as la peine de débattre). Cette propagande n'assèe pas des vérités explicites mais les considèrent comme acquises. C'est cette manière qu'ont aussi procédé les cinéma nazi, soviétique et fasciste. Ainsi, la propagande est detectée dans 90% des films mais n'est pas forcée. Seuls deu ou trois films ont été explicitement vichysois et s'exprimaient contre la franc-maçonnerie. Ils n'étaient cependant pas explicitement antisémites ( exemple : L'Inconnu dans la Maison de Henri Decoin en 1942, avec Raimu).


Ceux qui ont choisi l'exil en 1940

 

Au début de l'Occupation, les meilleurs réalisateurs et acteurs de la période de l'âge d'or (réalisme poétique) se sont exilés :

- Renoir, le plus grand cinéaste français de tous les temps, proche du PCF, part à Rome en 1940 (L'Italie n'est pas entrée en guerre tout de suite, Mussolini espérant s'allier avec les Alliés plutôt qu'avec Hitler). C'est son producteur italien qui lui a ensuite conseillé de fuir vers les Etats-Unis dont il a pris la nationalité avant de revenir en France en 1955.

- Duvivier avait commencé un film avant l'invasion et pendant la "drôle de guerre", Untel père et fils, éloge de la bonne famille républicaine. Il le termine juste à temps et en subtilise une copie avant de s'exiler aux Etats-Unis dont il reviendra en 1946. Ce film est projeté aux Etats-Unis comme acte de resistance durant toute la guerre et, à Paris dans l'indifférence générale en 1946.

- Feydert part très vite en Suisse avec sa femme, l'actrice Françoise Rosay. La Kermesse Héroïque a quand même été co-produit avec des capitaux issus de l'Allemagne nazie Françoise Rosay a assisté à la première à Berlin en 1936 (voire Le cinéma français de 1935 à 1945 (1) : le réalisme poétique (1935-1939) / La Grande Illusion ), elle y a été photographiée, souriante, avec Goebbels. Les choses ne sont donc pas si simples. En tout cas, Feyder et Françoise Rosay ont vécu dans la précarité en Suisse.

- Jean Gabin et Michèle Morgan, acteurs vedettes de la période précédente, qui formaient alors un couple dans la vie se sont exilés aux Etats-Unis

Seul un pourcent du personnel cinématographique s'est exilé, mais le cinéma français était décimé de ses meilleures têtes. Un partie des acteurs est aussi partie travailler à Nice ou à Marseille, en zone non occupée, y compris Danielle Darrieux, la star de l'époque. Mais le contrôle allemand de la production y était aussi présent.

Ceux qui se sont exilé se sont vu reprocher la lâcheté de ne pas combattre.

 

Le cinéma français sous l'Occupation

 

Peu de films ont été tournés en 1940. La production a repris en 1941 et s'est accélérée en 1942. 1943 et 1944 furent des années riches. 1945 correspond à la chute de l'année précédente : des films tournés en 1944 ne sont pas sortis avant la Libération.

 

La période 1942-1945 correspond à un deuxième âge d'or du cinéma français. Aucun chef d'oeuvre absolu n'a été réalisé (oeuvre parfaite qui donne lieu à un nombre infini d'interprétations possibles, très rare, un ou deux par an) mais il y a eu des bons chefs d'oeuvres de genre qui n'atteignaient pas le niveau de La Grande Illusion ou de La Règle du Jeu prduits durant la période précédente (voir  Le cinéma français de 1935 à 1945 (1) : le réalisme poétique (1935-1939) / La Grande Illusion ).

 

Pendant l'Occupation, le milieu du cinéma est privilégié, les acteurs atteignent des niveaux de salaire inimaginables. Et ceux qui sont partis ne retrouveront jamais leur position antérieure. Ainsi, Jean Gabin vivote aux Etats-Unis et plus personne ne veut de lui à son retour jusqu'à ce qu'il devienne une star vieillissante et grisonnante dix ans plus tard. Il a payé cher son radicalisme. Duvivier galère aussi à son retour.

 

Danielle Darrieux, Arletty, Ginette Leclerc, Mireille Balin, Charles Spaak ... sont restés.Tout come Autan-Lara, Grémillon, Robert Bresson, Jean Decker ou le duo Carné-Prévert.

 

La période de la Libération est très confuse. Aucune règle n'est fixée en matière d'"épuration".' Cette confusion a entrainée une perte de repères esthétiques et s'en suit une période cinématographique assez grise et pauvre

 

Nous les Gosses de Louis Daquin en 1941, avec Louise Carletti, Raymond Bussières, Gilbert Gil ...


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Les enfants mettent tout le monde d'accord. Le sujet n'est pas trop compremettant. A noter la présence d'une petite fille noire, signe que la censure n'a pas jouée. Daquin, le réalisateur était communiste. 

 

Les Visiteurs du Soir de Marcel Cané en 1942, avec Arletty, Jules Berry, Ferand Ledoux, Marie Déa, Alain Cuny ...

 

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Carné est le plus grand réalisateur de la période. Il ne s'est pas exilé mais on ne peut pas le soupçonner de collaboration ou de collaborationnisme, même de manière insidieuse.

 

Le film a été tourné en zone non occupée où le contrôle exercé par le régime de Vichy était plus sévère que celui de la Continentale en zone occupée. Seulement tout y était plus accessible (productions étrangères, matériel ...).

 

Le scénario est de Jacques Prévert, un anarchiste de gauche et c'est un film en costumes : le Diable (Hitler) arrive sur terre avec ses deux envoyés, Arletty et Alain Cuny qui sont chargés de troubler un mariage et de semer la zizanie dans le couple. Ce sont les nazis qui séduisent les individus faibles de ce couple et l'adultère symbolise la collaboration.

 

A cette époque, et en costume, il était difficile de détecter le message du film. L' Occupation était transposée au Moyen Âge.

 

La vie s'arrête pendant la phase de séduction, métaphore de la resistance passive.

 

Lumière d'Eté de Jean Grémillon en 1943, avec Georges Marchal, Pierre Brasseur, Madeleine Robinson ... Scénario de Jacques Prévert.

 

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Grémillon a eu une carrière compliquée. Il a réalisé Gueule d'Amour en 1937, L'étrange Monsieur Victor la même année, Remorques en 1939 (terminé plus tard lors que les deux vedettes sont parties - Jean Gabin et Michèle Morgan - il lui a fallu arranger le scénario et le film es sorti en 1941).

 

L'intrigue e déroule en Haute-Provence, ce qui détonne par rapport au parisianisme du cinéma français. Il s'agit d'une critique de la classe possédante qui agit contre toute morale.

 

Il a aussi réalisé Le Ciel est à Vous en 1943. C'est l'histoire d'un couple anonyme. La femme se prend de passion pour l'aviation, encouragée par son mari. Elle devient championne. Il s'agit peut-être d'un film de resistance dont le message serait : il faut tenir bon, on va finir par vaincre.

 

Goupi Mains Rouges de Jacques Becker en 1943, avec Fernand Ledoux, Robert Le Vigan, Georges Rollin ...

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Série Goupi consacrée à une famille charentaise, film considéré comme pétainiste car il parle de la terre (qui elle ne ment pas, NDLR) et de la famille. De plus, Le Vigan était un collaborationniste forcené.

 

Il s'agit plus d'un rare film précis et minutieux sur le monde paysan que d'un hymne à la terre pétainiste, même s'il était plutôt arrangeant pour le régime de Vichy. Ceci témoigne de l'ambivalence du cinéma français à cette époque.

 

Le Vigan, nazi convaincu, s'est réfugié en Allemagne à la Libération, avant d'être arrêté au Danemark en compagie de Céline et extradé vers la France. Lors de son procés, des acteurs non collaborateurs qui l'avaient cottoyé ont néanmoins témoigné en sa faveur : il était plus fou que nazi.

 

Le Corbeau de Henri-Georges Clouzot en 1943, avec Pierre Fresnay, Ginette Leclerc, Hélèna Manson, Pierre Bertin, ...

 

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Voir aussi : Un fait divers à l'écran : l'affaire des soeurs Papin (1) / "Les Abysses" (1963)

 

C'est un très bon film. Un corbeau envoie des lettres anonymes pour salir la réputation de la bonne société à Tulle en Corrèze (je ne sais pas qui est ce fameux corbeau, puisque je n'ai vu que des extraits mais c'est un DVD que je pourrais acheter. Et je n'en achète pas beaucoup, NDLR ).

 

Des années plus tard, il a gardé son pouvoir de facination. En 1945, on a reproché à Clouzot d'avoir montré une image de la France en déclin, comme le souhaitaient les allemands (déclin de la démocratie, délation dans un microcosme occupé). Cependant, nombreux étaient les intellectuels qui, à gauche comme à droite, ont reconnu les qualités de ce film. Il ne s'agissait pas d'un éloge de la délation.

 

Occupation ou pas, on retrouve ce qui caractérise Clouzot : sadisme, noirceur, absence totale de poésie, pessimisme, idée que l'homme est un loup pour l'homme.

 

Douce de Claude Autant-Lara en 1943, avec Jean Delcourt, Roger Pigaut, Odette Joyeux ...

 

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Même s'il n'est pa poète, Autant-Lara est un excellent cinéaste. Il a réalisé Le blé en herbe d'après Colette (1953), Le Diable au Corps d'après Radiguet (1947) ou encore Le Rouge et le Noir d'aprs Stendhal (1954) (trois romans qui ont marqué mon adolescence, NDLR).

 

 

L'histoire se déroule à la fin du 19° siècle dans le milieu des possédants qu'Autant-Lara déteste. C'est un anarchiste de droite qui déteste les bourgeois, l'église et l'armée. Il n'a pas était résistant pour autant et a même fleurté avec le Front National à la fin de sa vie (d'ailleurs j'ai trouvé l'illustration de ce film sur un site Internet à la gloire du Maréchal Pétain, mais il ne faut pas laisser les imbéciles s'approprier la culture par dogmatisme et sectarisme, NDLR). 

 

Dans le film, l'infirmité symbolise l'aristocratie.

 

L'Eternel Retour de Jean Delannoy en 1943, avec Jean Marais, Yvonne de Bray, Madeleine Sologne ...

 

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Ce film réalisé par un cinéaste médiocre fut le triomphe de l'Occupation. C'est la transposition de la légende de Tristan et Iseult, un amour qui ne peut se réaliser qu'au delà de la mort. La morale n'est peut-être pas vichysoise.

 

Jean Marais a eu la chance de ne jamais être sollicité par la Continentale et de ne pas se compromettre durant cette période.


 

La compromission dans le milieu du cinéma

 


Le scénariste Charles Spaak a travaillé sur 6 films durant l'Occupation, dont 3 produits par la Continentale, et il a expliqué pourquoi (rare témoignage sincère à propos de cette période confuse): on ne lui a jamais demané de faire des films de propagande. Les acteurs se sont plutôt compromis à l'occasion de réceptions mondaines ou dans des restaurants chers, mais pas à cause des films dans lesquels ils ont joué. Micheline Presle, par exemple, n'a jamais participé à ces récepions et ne s'est pas compromise.


Beaucoup se sont aussi compromis à l'occasion d'un voyage à Berlin en 1942. Ce voyage avait été organisé de manière  prouver au peuple que malgré les tournants de la guerre, les allemands la dominaient toujours. C'était un voyage de propagande auquel ont été convié les acteurs sous contrat avec la Continentale : Suzy Delair, Albert Prejean, Viviane Romance, ... Et même Danielle Darrieux à qui c'est la seule chose qu'ont peut reprocher (star depuis 80 ans, un cas unique).A ce propos, elle expliquera qu'elle avait été victime d'un chantage par rapport à son fiancé et futur époux, Porfirio Rubirosa, resistant notoire. Elle a d'ailleurs refusé toutes les propositions de la Continentale après ce voyage.

 

Arletty et Mireille Balin étaient quant à elles tombées amoureuses d'officiers allemands. Elles ont été traquées et emprisonnées (et même violée pour Mireille Balin !) par des FFI à la Libération, alors quele crime n'était pas non plus si énorme. 

 

Les principaux compromis :

- Sacha Guitry :fréquentation de l'ambassade d'Allemagne, condamné à la Libéeation

- Robert Le Vigan, collabo forcené considéré comme fou lors de son procés

- Michel Simon idéologiquement vichysois

- Pierre Fresnay était aussi pro-allemand

- Fernandel : une dizaine de phtos comprommettantes avec Goebbles, il ne sera cependant pas sanctionné dans sa carrière contrairement à Arletty qui était moins compromise et srtout à Jean Gabin alors que ce dernier avait choisi l'exil ...

- Harry Baur qui a eu un comportement incompréhensible : il accepte de tourner un fil en Allemagne où il est dénoncé comme juif avant d'être relaché complètement épuisé. S'il éait juif pourquoi serait-il allé tourner en Allemagne et srtout pouruoi aurait-il été relaché ? S'il ne l'était pas, pourquoi avoir été arrêté ?

 

A la Libération, la confusion règne. Et la lumière doit encore être faite à propos de cette période !

 

Volpone de Maurice Tourneur en 1941, avec Harry Baur, Louis Jouvet, Charles Dullin ...

 

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Les Enfants du Paradis

 

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De Marcel Carné

France, 1945, 182', noir et blanc

Avec Arletty, Jean-Louis Barrault, Pierre Brasseur, Maria Casarès

 

Le Méliès a dit

 

Un des meilleurs films français des années de guerre, et la plus belle réussite du couple Carné-Prévert.

De 1840 à 1847, dans le Paris romantique, l'entrecroisement de destins aux confins du théâtre et de la vie. Les Enfants du paradis  fut une exceptionnelle rencontre de talents : Prévert et Carné, les décorateurs Barsacq et Trauner, les compositeurs Thiriet et Kosma, et quatre interprètes entrant par ce film dans la mythologie  du 7ème art : Arletty, Jean-Louis Barrault, Pierre Brasseur et Maria Casarès

 

 

Les enfants du Paradis 1

 

Présentation dans le cadre du cours


C'est la première fresque du cinéma français : multitude de scénarios entreposés et tous les sentiments humains possibles y sont répertoriés.

 

Le scénario de Jacques Prévert renvoie constament de a vie à l'illusion. Et c'est une reconstitution historique du Paris romantique pré hausmanien, reconstruit sur 140 mètres de long.

 

Que dire de plus ?


Encore une foi, tout a été dit. Le film était long mais je ne me suis pas ennuyée une seule fois : on rit, on pleure, on rage, on ironise, on hait, on méprise, on aime ... Bref, le spectateur entre littéralement dans la vie des personnages, et c'est ce qi fait un grand film !

Publié dans Ciné

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L
Harry Baur a été forcé par les allemands de tourner chez eux. Il n'était ni juif ni collabo. Au contraire un martyr. Beaucoup d'imprécisions dans votre blog sur ce sujet épineux!
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B
<br /> <br /> Tu as certainement le blog le plus poussé dans l'analyse cinématographique!! Je te remercie car je me cultive sans payer!!<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
L
<br /> <br /> De rien mon cher Bruce. Mais encore une fois, je n fais que retranscrire les excellents cours aux quels j'a la chance de pouvoir assister deux fois par mois.<br /> <br /> <br /> En mai ce sera Michelangelo Antonioni et en juin je pars deux semaines en vacances : ma seule hantise est de ne pas être là pour un des deux cours<br /> <br /> <br /> (Je prie Saint-Méliès pour avoir gain de cause : pas de curs avant le mardi 15 juin svp !!!!)<br /> <br /> <br /> <br />