Une journée particulière

Publié le par La fée Paradis




Réalisé par Ettore Scola
Avec Sophia Loren, Marcello Mastroianni, John Vernon ...
Sortie en septembre 1977, reprise le 17 juin 2009






Utopia a dit :

Bon sang qu'elle était belle Sophia Loren ! Même quand elle faisait semblant de ne pas l'être, en mère de famille nombreuse aux bas filés, au linge toujours à sécher… Même décoiffée, même avec des cernes ajoutés, même avec le bruit des bottes fascistes qu'elle serait bien allée entendre de plus près…

Nous sommes en 1938, à Rome et Mussolini reçoit en grande pompes Hitler avec qui il a signé, deux ans plus tôt, un traité qui lie l'Allemagne Nazie à l'Italie, fasciste depuis un bon bout de temps. Tous les romains ont déserté leur maison pour aller voir la rencontre historique. Mais Antonietta, parce qu'elle a six enfants, se voit confinée dans son immeuble désert à s'occuper des tâches ménagères. Désert… Finalement pas tant que ça puisqu'elle aperçoit, de l'autre côté de la cour, Gabriele (Marcello Mastroïani) qui lui n'a aucune envie de se rendre au défilé : viré de la radio, où il était présentateur, pour cause d'homosexualité, il se demande quelle gueule a le destin qui l'attend et on se doute qu'il n'a pas la même fascination pour les discours du Duce retransmis intégralement avec l'ensemble de la manifestation par la radio qui l'a rejeté.
Dans la chaleur de cette belle journée de mai, une étrange relation va germer entre la mère de famille inculte, soumise aux désirs de son mari, fière de réaliser pleinement son destin de femme fasciste, et l'intellectuel contestataire écarté pour « non conformité », qui lui tient des propos qu'elle n'aurait jamais imaginé. Un rapprochement qui va atteindre un point de fusion extrême dans une intense autant que brève et improbable relation amoureuse.
Tout au long de cette journée si particulière, Antonietta va entrevoir qu'elle aurait pu être autre chose que cette femme dont la vie s'étiole à force de jouer les bonnes reproductrices, partagée entre les lits à faire, les lessives, les repas à préparer pour son troupeau d'affamés qui ne lui en savent aucun gré. Tandis qu'elle découvre que cet homme qui lui semble tellement estimable et aimable ne peut qu'être broyé par le régime qu'elle défendait jusqu'alors.
Dehors, dedans, par la radio, par la musique militaire qui fait vibrer les murs… on n'échappe pas à la parole fasciste et on entend la foule qui acclame Hitler et le Duce. Ettore Scola, mêlant de nombreux documents sonores et images d'archives, nous plonge dans l'ambiance de ce jour-là, où, petit garçon, il défila lui-même dans les rangs des jeunesses mussoliniennes.
Il y a eu peu de films sur cette période, et encore moins de cette force-là. Le film se concentre sur les deux personnages et ne quitte pas le cadre de l'immeuble où ils vivent, il offre pourtant un portrait saisissant de l'Italie fasciste, son organisation sociale, sa culture du soupçon, la surveillance quotidienne des autres… et l'omniprésence de la propagande, formidable machine à décérébrer : le fascisme contrôle les esprits, depuis les rêveries romantiques des mères au foyer jusqu'aux jeux des gamins et ne parlons pas de l'utilisation du sport pour le conditionnement des hommes…

« Certes, le fascisme historique est mort en tant que régime, mais le fascisme psychologique quotidien, le fascisme qui impose la norme et condamne celui qui est différent, n'est pas mort… L'homosexuel était une offense à l'homme victorieux, une atteinte au culte du mâle. Un homme qui se respectait fréquentait les maisons closes : plus il avait de femmes et plus les autres l'estimaient »… C'est Ettore Scola qui le disait en 1977 et on ne peut s'empêcher de penser à l'autre séducteur de bazar et à sa querelle avec sa femme : est-ce ainsi qu'il faut comprendre que la découverte de ses frasques ajoute encore à sa popularité ?



Que dire de plus ?

Après Mariage à l'italienne (de Vittorio de Sica, 1964, reprise en juillet 2008), Pépé et moi avons renoué avec nos acteurs fétiches pour un drame et non une comédie cette fois !

Je l'avais déjà vu de loin à la télé mais ce passage sur grand écran est autrement plus émouvant. Après une mise en perspective historique de la rencontre grotesque entre Hitler et Mussolini, nous ne quittons plus cet immeuble d'architecture totalitaire, une sorte de ville dans la ville un peu labyrinthe où chacun s'observe, près à traquer l'antifacisme comme un crime. La "charmante" concierge de l'immeuble joue à son rôle à merveille.

La rencontre entre les deux principaux protagoniste, improbable mais irrepressible dans un tel contexte, est haute en couleur et pleine d'émotions. Le réalisateurs et les acteurs montrent des sentiments et des réactions justes entre abattement, tentratives de légèreté et surtout une profonde impression de gachis. La fin est dramatique mais que pouvait-on espérer de mieux ?

La reprise vient de sortir, n'hésitez pas à en profiter !

Publié dans Ciné

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F
Je m'auto commente de plus en plus ... Petite précision qui me semble importante : Alessandra Mussolini, député européenne de l'extrême droite italienne est présente au générique de ce film. Il s'agit en fait de la nièce de Sophia Loren dont la soeur a épousé le fils de Bénito Mussolini (si Wiki ne dit pas de bétise) .... Les repas de famille doivent être animés !
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