The Ghost-Writer

De Roman Polanski
Avec Ewan McGregor, Pierce Brosnan, Kim Cattral, Eli Wallach ...
Grande-Bretagne / 2010 / 128' / couleur / vostf
Le Méliès a dit
Roman Polanski est un des derniers cinéastes à combiner cinéma d'auteur et divertissement populaire. Ours d'argent au dernier festival de Berlin, son nouveau film, qui évoque à la fois Chandler et Hitchcock, renoue avec la veine faussement policière du cinéaste, où il excelle à débusquer l'étrange et le bizarre sous les oripeaux du récit criminel.
The Ghost-Writer reprend un récit de Robert Harris : lorsqu'un célèbre nègre littéraire anglais accepte d'achever les mémoires de l'ancien premier ministre Adam Lang (personnage qui renvoie, de manière à peine voilée, à Tony Blair), son agent lui assure que c'est la chance de sa vie. Mais le projet semble d'emblée marqué par la fatalité : le nègre apprend ainsi que son prédécesseur, fidèle bras droit d'Adam Lang, est mort dans un mystérieux accident...
Le film nous propose par ailleurs une éblouissante distribution : Ewan McGregor, Pierce Brosnan, Kim Cattrall, James Belushi, Timothy Hutton – et le vétéran Eli Wallach, grand acteur de composition vu dans Baby Doll, les Sept Mercenaires et les Misfits.
Que dire de plus ?
Comme on est arrivé trop tard samedi (complet), j'ai du resortir de chez moi hier soir à une heure tardive pour voir ce film en VO (en VF j'aurais eu plus de choix dans les horaires, mais pas au Méliès). Le jeu en valait la chandelle, rien que pour Samantha (Kim Cattral, Sex and the City), Tuco dit le Truand (Eli Wallach, Le Bon, la Brute, le Truand ) et Ewan MacGregor qui est décidément très bon (voir I love you Phillip Morris ).
En plus c'est un film anglais, ce qui me permet de m'entrainer pour la deuxième session du cours du mois de mars (Le cinéma anglais, de l'après-guerre au Free Cinema (1945-1968) / Noblesse Oblige (1949) ) et, pour mon plus grand plaisir, la politique et les jeux d'acteurs y occupent une très grande place !
Dès la première scène (sortie de véhicules d'un ferry sous une pluie battante dans una atmosphère qui ne fait vraiment pas envie), le ton est donné. Déjà, on oublie le soleil : il ne fera jamais beau ! Le réalisateur nous perd dans un jeu d'acteurs complexe où on peine à identifier les bons et les mauvais sur fond d'espionnage et de CIA. Le pauvre "nègre" se trouve embarqué dans une affaire qui le dépasse. Mais il s'adapte très bien à la situation.
La mise en scène est brillante, tout comme les acteurs, pour nous mener à une conclusion finalement assez drôle et cynique. C'est un très très bon film, tant d'un point de vue esthétique, que scénaristique.
Visiblement, la question de la guerre en Irak sous couvert de lutte contre le terrorisme pose question aux anglais (voir aussi le plus satyrique et moins esthétique In the loop ). J'espère qu'Adam Lang n'est pas vraiment Tony Blair mais c'est certain que l'homme politique a inspiré le réalisateur (parti travailliste, relations plus que floues, voire troubles, avec les Etats-Unis).
En tout cas, il y a de quoi se poser des questions : certains Etats se sont permis d'attaquer un autre Etat, contre l'avis de l'ONU et malgré les protestations massives des peuples à travers le monde, sur la base d'un mensonge qui a été mis à jour peu de temps après. Et le chaos règne toujours en Irak comme en Afghanistan, des soldats occidentaux y meurent régulièrement, des prisonniers sont torturés, des inocents ont été bombardés et sont toujours victimes de combats incompréhensibles ... Et les décideurs de l'époque coulent des jours de retraite heureuse ... Loin des super productions américaines qui montrent un monde manichéen de méchants puissants contre des bons faibles en guise de méa culpa (Avatar, Démineurs ...), merci au cinéma anglais d'aller plus loin et de se poser la question des jeux d'acteurs et des mécanismes décitionnels.
Vous l'aurez compris, ce film est à voir en priorité en ce moment !
Ma note : 4,25 / 5
En bonus : la photo de l'apparition du truand (Le Bon, la Brute, le Truand ). Il a vieilli mais il est toujours aussi énorme.